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MACRON, UN FAUCON PARMI LES PIGEONS

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La France semble enfin réaliser l’ampleur de la crise géopolitique qui la confronte à travers le monde.

 

Washington, auparavant connu comme étant le bouclier de l’Europe, risque d’abandonner ses alliés sous le poids d’extrémistes contrôlant le Congrès américain. De son côté, l’Allemagne, le moteur économique de l’Union européen, est aux prises avec un leader qui semble être incapable de courage. Ainsi, le fardeau du leadership tombe sur les épaules françaises.

 

Pendant longtemps, l’Élysée fut naïf envers Moscou. En 2014, le président François Hollande réagit avec indifférence lorsque la Russie annexe illégalement la Crimée ukrainienne et entame une invasion de la région du Donbass. Depuis cela, aucun Etat n’a dépassé Moscou dans sa quête de propagande anti-française tout en compromettant les intérêts français à travers le monde.

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La France n’a pas sanctionné la Russie pour son crime d’agression envers ses voisins en Géorgie et en Ukraine. Face à ce manque de courage, Moscou s’est infiltré dans la guerre civile syrienne pour sauver le dictateur Bachar el-Assad et sa politique brutale. Malgré les 500’000 morts en Syrie, Paris continuait de vendre de l’équipement militaire à la Russie. Pour l’Élysée, c’était un compromis basé sur la bonne foi afin de «renforcer la coordination entre les pays». Pour Vladimir Poutine, c’était une faiblesse à exploiter et un moyen d’obtenir des concessions.

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Rassuré par la fragilité française, Moscou a mis les anciennes colonies de la France en Afrique dans sa ligne de mire. La Russie a commencé avec la République centrafricaine en 2016. Ensuite, le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Huit ans plus tard, la milice Wagner a remplacé les soldats français comme partenaires stratégiques de choix à travers l’Afrique de l’Ouest. Ceux qui ont célébré le départ des troupes françaises en Afrique ont rapidement compris que l’alternative russe était parsemée de corruption, de brutalité et de souffrance.

 

Bien évidemment, la France et la Russie ne sont pas des alliés. Loin de là. Malgré cette réalité, le président Macron a hérité de l’attitude des administrations qui l’ont précédé. Ce qui l’a poussé à tenter de jouer le rôle de «diplomate» passant des heures au téléphone avec Poutine, soulignant la nécessité de maintenir le dialogue. Non seulement il perdait son temps, mais il faisait également preuve d’auto-dissuasion en déclarant publiquement quelles lignes rouges l’Occident ne franchirait pas pour aider l’Ukraine.

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Après des années de jeu défensif contre le Kremlin, la France commence finalement à riposter. En 2023, Paris a suivi Londres en donnant des missiles de longue portée à l’Ukraine. Depuis que l’Azerbaïdjan a gagné le dernier conflit du Haut-Karabakh, la France a remplacé la Russie comme partenaire stratégique de choix pour l’Arménie, auparavant un allié principal de Moscou. De plus, le président Macron renforce présentement les relations avec les États d’Asie centrale dans les coulisses du pouvoir russe. Bien que Paris soit toujours à la traîne de ses partenaires occidentaux en ce qui concerne l’assistance militaire pour l’Ukraine, la position de la France évolue néanmoins dans une direction positive.

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Le président Macron a finalement énoncé l’évidence en proclamant que «la défaite de la Russie est indispensable à la sécurité et à la stabilité en Europe».  Ainsi, il n’exclut pas d’envoyer des troupes au sol afin de s’assurer que la Russie ne puisse pas gagner la guerre en Ukraine. Une mission défensive dirigée par l’Union européenne est plus que raisonnable et réalisable. En effet, cela permettrait à l’Ukraine de céder la défense de ses frontières avec la Biélorussie aux forces occidentales afin de renforcer le front dans les régions de Kherson, Zaporijia, Donetsk et Louhansk. Dans le meilleur des cas, une telle mission ferait en sorte de défendre tout ce qui se trouve à l’ouest du fleuve Dniepr. En protégeant l’espace aérien de l’Ukraine, cela aiderait non seulement les civils mais aussi l’économie ukrainienne en favorisant l’ouverture des aéroports dans l’ouest du pays.

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Les mots doux, les pensées, les prières et les séances de photos sont des gestes mignons. Mais ce n’est pas assez pour vaincre le mal. Après plus d’une décennie de déni, Paris constate finalement que «la Russie est une menace directe et immédiate pour la France sur tous les plans». Enfin, le président Macron se démarque comme un faucon parmi les pigeons. Espérons que ses grandes déclarations seront désormais accompagnées de grands gestes décisifs.

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Initialement publié par la Tribune de Genève le 22 mars, 2024.
 

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